La santé à l'heure du régionalisme


L'informatique hospitalière et plus généralement médicale donne aujourd'hui l'impression d'une grande dispersion. On parle toujours de systèmes d'information hospitaliers (évoquant l'intégration), d'échanges de données informatisés et les projets de carte santé laissent attendre d'énormes réseaux. Mais cela n'empêche pas l'informatique de se répartir en de multiples petits systèmes, souvent plus proches de l'artisanat voire du bricolage, que de produits industriels soumis à la doctrine de la "qualité totale". Les progiciels, mais aussi les comités, commissions et collèges en tous genres prolifèrent. Un dessin humoristique du bulletin du Sirif (Syndicat interhospitalier régional d'Ile de France): "Grâce au CROH, au CRIH, au CRAH, au AM, au BIB, le recours au SALU a pu être évité" (NDLR: deux seulement de ces sigles sont imaginaires).

L'évolution des outils informatiques (micro-ordinateurs, machines intermédiaires) contribue à cet éclatement. Mais il trouve surtout sa cause dans la dispersion même de notre système de santé, dans les exigences mêmes des activités médicale, et dans la psychologie même des praticiens. Du fait de sa culture scientifique poussée, le médecin, s'il le souhaite, s'approprie aisément l'outil informatique et peut tenir la dragée haute aux informaticiens professionnels (qui à l'occasion, lui pardonnent difficilement cette concurrence). Mais, du fait de ses responsabilités très directes auprès des malades, il se méfie à juste titre des grands "systèmes", qu'ils soient informatiques ou simplement administratifs. De plus, la protection de la vie privée de leurs patients justifie leurs réticences à tout système d'information trop transparent. S'y ajoute, au moins dans les centres hospitaliers universitaires, la propriété des observations relatives à leurs travaux.

Les professionnels de la médecine se voient donc séparés par de profonds clivages: entre médecins, entre gestionnaires et médecins, entre établissements, et entre les différents niveaux locaux, régionaux et nationaux.

Les différentes presssions qui s'exercent aujourd'hui sur le monde médical ne facilitent rien: revendications des infirmières, exigences hygiéniques accrues face au Sida, pression économique pour contenir le budget global de la santé.

Enfin, conséquence ou cause supplémentaire de cette dispersion, les pouvoirs publics n'ont pas su doter la communauté médicale des outils de communication ni des progiciels nécessaires. La Cour des comptes en juge sévèrement dans son rapport de 1992 "... l'administration a mené une politique souvent indécise, fondée sur des outils juridiques et financiers incertains... les objectifs -cohérence et efficacité- sont loin d'avoir été atteints. De surcroŒt, il n'est pas certain que toutes les précautions et garanties aient été préises pour faire prévaloir l'intérêt général". Sur ce dernier point, la Cour conteste surout la dévolution (transfert au secteur privé) du CNEH et de la DII (division de l'ingénierie informtaique).

Dans sa réponse, le ministère défend son action (voir encadré), et en trace un historique dont la portée dépasse le secteur hospitalier, car on peut la considérér, sur le plan des logiciels et indirectement des architectures techniques, comme une sorte de down-sizing au niveau national.

En contre-partie de cette incohérence, le monde médical et hospitalier en particulier peut se permettre d'explorer toutes sortes de pistes technologiques. L'intérêt humain (et médiatique) de la santé permet parfois de financer des expériences novatrices, comme le prototype de disque compact interactif (CDI) à l'Hôpital Beclere de Clamart.

Le micro-ordinateur se diffuse, parfois sans contrôle, souvent avec l'aide d'un sponsoring (par exemple, des portatifs pour les enfants malades avec l'aide de Toshiba). L'ardoise électronique (notepad) serait particulièrement à sa place dans les unités de soins (NCR en a montré l'application en médecine d'urgence).

La clinique et l'hôpital offrent un domaine de choix aux machines intermédiaires, et un grand nombre de construceurs peuvent y trouver des niches: Bull, Data General, DEC, IBM, Unisys... soit avec leurs systèmes propriétaires (AS/400, VMS), soit en convergeant vers les systèmes ouverts. Réseaux locaux et bases de données (Oracle notamment) deviennent la règle.

Traits d'union dans ces paysages contrastés, les réseaux tissent peu à peu une trame robuste. Application de base, la messagerie et les liaisons entre micros. Mais le besoin de transmettre l'image pousse énergiquement vers les hauts débits (importantes installations à Lille, Rennes, Bordeaux, Lyon), qui trouvent à l'occasion des sources de financement inattendues, par exemple la diffusion payante de télévision dans les chambres de malades.

Les réseaux débordent le cadre des établissements spécialisés. Le corps médical, mais aussi les gestionnaires de la santé et certains élus locaux y voient un outil de plus pour alléger les charges hospitalières. Les variantes de télédiagnostic se multiplient, soit par transmission de paramètres numériques (électro-cardiogrammes), soit par vidéo-transmission voire visio-conférence (par exemple à l'Adicap, qui réunit les anatomo-cyto-pathologistges).

Enfin, l'ensemble du secteur se prépare à une mutation majeure: la carte santé. Elle sera évoquée au prochain colloque Medec (du 31 mars au 3 avril, au Cnit), et sans doute plus encore à Hopital Expo, en décembre prochain.



Au cours des deux dernières décennies, le secteur public d'hospitalisation, qui comprend plus de 1 000 établissements, a fait apppel, de manière croissante, à l'informatiqeu pour améliorer notamment sa gestion administrative et financière. De ce fait, les dépenses informatiques ont progressé rapidement pour atteindre en 1990 2,3 milliards de francs, ce qui ne représente qu'une proportion très raisonnable (1,25 p.100) des dépenses totales du secteur. On peut penser que ces dépenses progreseront dans les prochaines années pour atteindre un taux de 2 à 3 p. 100 comparable à celui observé dans d'autres secterus de l'activité économique (services, autres admnistrations).

L'évolution de la politique hospitalière du ministère de la santé reflète à la fois l'évolution de la politique générale du ministère de la snté, qui est allée vers un eplus grande autonomie et responsabilisation des acteurs, concrétisée en 1991 par la nouvelle loi hospitalière, et l'évolution des techniques informatiques elles-mêmes, qui ont peu à peu conduit à une diversification et à une délocalisation des solutions informatiques.

Jusqu'en 1976, c'est l'administration centale qui a mis au point les logiciels pour l'ensemble des centres hospitaliers, à l'instar d'auters grandes administations (comptabilité publique ou sécurité sociale) ayant des problèmes comparables.

En 1974, l'administration a cré le Centre national de l'équipement hospitalier (CNEH) pour répondre à l'apparition de besoins et de contraintes nouvelles pour les hôtitaux: développement répide de l'équipement biomédical et informatisation progressive de outes les fonctions de base de l'hôpital et les modifications corrélatives de l'organisation.

En 1976, ont été transférées au CNEH les activités informatiques nationales. A cette date, l'associaton é été soumise au contrôle financier de l'Etat.

En, 1982, a eu lieu une première étape de déconcentration au profit de filières qui étaient des ensembles cohérents et complémentaires de logiciels fonctionnant sur uen catégorie donnée de matériels et adaptée à une taille déterminée h'hopitaux. Le CNEH participera à l'une de ces filières.

Enfin, en 1989, compte tenu principalement de l'évolution du marché et des solutions technique, et dans le but de rendre plus performante l'informatique médicale, était donéne la totale liberté de décision en matière informatique aux hôtitaux. Dans le meme temps, et pour la même rison d'efficacité, était décide la dévolution des services informaiques du CNEH.

Au total, l'administation a engagé là une politique volontaire et cohrence dont les résultats, notamment ence qui concerne les retards, doivent être jugés en fonction de l'ampleur de la tâche réalisée.

LMI 14/2/1997